La cyber littérature recouvre aujourd’hui deux champs complémentaires de recherche :
– Le premier concerne le processus d’écriture en lui même. On étudie la possibilité de génerer des livres linéaires, des récits de forme classique par ordinateur. L’intérêt est de mieux analyser le processus du romancier. On produit des livres au sens classique du mot qui désigne est un objet fini, un récit que son auteur a terminé avant de le remettre à son éditeur puis par son biais à ses futurs lecteurs.
– Le second champ, a contrario, s’intéresse à produire un hypertexte, c’est à dire une uvre élastique, perpétuellement personnalisable et inachevée qui pourra gonfler et dégonfler en fonction des simples désirs d’un lecteur, devenu aussi un peu auteur : ces hypertextes font éclater lunivers clos de louvrage linéaire.
A quand des cybergénérateurs pour écrire nos éposides de séries TV ?
Avec la généralisation de l’informatique et de l’internet, des oeuvres de cyber littérature apparaissent et transcendent leurs précurseurs de lOulipo, en dépassant leurs limites qui étaient la simple expression de règles accompagnées de la formulation de quelques solutions figées, et ce dautant que les machines daujourdhui ont la puissance de travailler à de multiples niveaux vocabulaire, structure de la phrase, construction des personnages, de lintrigue. La toute fin du XXème siècle a été marquée en France par une grande activité de création dans ces domaines au sein de lA.L.A.M.O. et du Labart.
Aujourdhui, la majorité des tenants de la cyberlittérature, comme les Brésiliens du NUPILL qui éditent Revista Text Digitala et les Français du centre Hubert de Phalèse travaillent plus sur l’informatique comme un outil de navigation, d’enrichissement par des variantes ou de production d’hypertextes en ligne, tandis que ceux qui -comme R. Pérez y Pérez à l’université de Mexico– approfondissent la recherche sur la création romanesque et la gestion du récit linéaire par les émotions qu’il peut susciter, sont devenus minoritaires.
Ainsi, la cyber littérature est plus présente sur le front des hypertextes que sur la génération d’un effet de réel par un automate romancier linéaire. Cette seconde question, pourtant centrale pour la littérature, semble devoir attendre une nouvelle génération de progrès pour redevenir d’actualité : il faudra que les chercheurs ne sintéressent plus seulement à transgresser le monde clos de louvrage livré en travaillant à des hypertextes, reliant auteurs et lecteurs à des hyper-feuilletons multiples sur le web [1], mais en reviennent à travailler sur l’effet de réel, base intemporelle de la fiction réussie.
Vu sous cet angle, l’histoire que met en scène « Romanesque 2.0 » (cf http://romanesque .fr ) pourrait paraître à certains comme une intrigue dépassée… A moins qu’au contraire, elle ne préfigure une nouvelle vague de questions qui vont devenir d’une grande actualité dans quelques années.
Est-il en effet si loin le momment où les automates aujourd’hui encore trop complexes comme Mexica commenceront à produire les sécnarii des multiples épisodes des séries TV que nous consommeront sans problème en prime time chaque semaine.
Et alors, on se dira que l’on aurait pu s’y attendre.
Quelques repères bibliographiques en français sont disponibles à :
http://hypermedia.univ-paris8.fr/articles.htm à signaler particulièrement :
BALPE J.-P., LELU A., SALEH I. (coords.)
Hypertextes et hypermédias: Réalisations, Outils, Méthodes, Hermès, Paris, 1995. Voir en particulier : Jean Clément, Du texte à l’hypertexte: vers une épistémologie de la discursivité hypertextuelle, (http://hypermedia.univ-paris8.fr/jean/articles/discursivite.htm#litmach )
La littérature au risque du numérique Jean Clément, Document numérque n°X/2001 http://hypermedia.univ-paris8.fr/jean/articles/docnum.pdf